Mis à jour le 23 septembre 2022 Pr Daniel MARCELLI
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Être une mère parfaite… Est-ce bien raisonnable ? Cet enfant vous l’avez espéré et pour lui vous souhaitez le meilleur. A commencer par la meilleure des mamans. Mais être une mère parfaite est-ce réalisable… Et est-ce souhaitable ?
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À l’ère de la super woman
Vous êtes confrontée à travers les médias au culte de la perfection et de la performance. La pression sociale vous pousse à être accomplie sur tous les plans : réussir votre carrière professionnelle, votre vie de femme, d’épouse, d’amante et de mère également, en donnant à vos enfants une éducation admirable.
La mère parfaite cherche à faire coller parfaitement l’idée qu’elle se fait de la mère idéale et le rôle qu’elle tient. Il n’y a finalement pas de place pour l’enfant dans cette idée là.
Dans la mère parfaite, il y a aussi celle qui veut combler son enfant à tout prix et être tout pour lui. Cette mère là donne tout à son enfant avant même qu’il n’en éprouve (et par conséquent n’en exprime) le désir.
Savoir frustrer son enfant
Or si votre enfant reçoit à manger par exemple avant même qu’il n’en ait « l’appétit », il se voit spolié du désir et par là même du plaisir de la faim, puis de celui d’être rassasié. Chercher à coller immanquablement à tous ses besoins le prive aussi de la frustration. Or en refusant quelque chose à votre enfant, ou en retardant le moment de le satisfaire, vous lui enseignez ce sentiment nécessaire à son éducation.
Vous lui montrez des limites et lui donnez des repères, ce qui le rassure puisque vous lui prouvez que vous l’aimez en lui montrant ce qui n’est pas bon pour lui.
Donald Winnicott parlait de mère « suffisamment bonne ». Votre enfant n’a pas besoin d’une maman « trop » bonne. Que vous éprouviez l’envie de faire de votre mieux, intention des plus louables… Mais entre les conseils (et parfois les injonctions) de votre entourage, les souvenirs de votre propre éducation et l’intuition que vous avez de ce qui est le mieux pour votre enfant, pas facile de s’y retrouver.
La perfection évidemment est quelque chose vers lequel on tend même si on sait qu’elle est inaccessible. Le problème de la mère parfaite est qu’elle poursuit cette utopie et va donc vers une déception inévitable, pouvant s’accompagner de stress et même de déprime.
Être parfaite pour se sentir aimée
Toute maman a envie d’être aimée en retour. Ainsi il est tentant de tout passer à son enfant et de se rendre indispensable… dans l’espoir qu’il nous aime. Sauf que votre enfant a besoin de pouvoir se passer de vous en grandissant.
Quand l’heure sera venue pour lui de s’affirmer, il va éprouver la nécessité de s’opposer à vous. Face à une mère parfaite, cela peut sembler difficile. Comment en effet remettre en question votre autorité si vous êtes irréprochable ? Il peut culpabiliser d’oser vous contredire… et se sentir bien incapable d’être à la hauteur… Pas évident pour s’affranchir.
A mère parfaite… enfants imparfaits.
Être une mère parfaite n’est pas une potion magique pour avoir à coup sûr un enfant parfait. On récolte souvent l’effet inverse à celui escompté. Outre que votre enfant peut se décourager devant tant de perfection, il subira aussi d’autres influences – heureusement d’ailleurs – dans l’entourage, à l’école… et verra que si le monde est loin d’être parfait il ne s’en porte pas plus mal, bien au contraire. En acceptant votre imperfection et celle de votre enfant, en le laissant se débrouiller tout seul et faire ses propres erreurs… vous le laissez libre de grandir.
Une mère parfaite… ment imparfaite.
Si vous restez vous-même, avec vos incertitudes, vos questionnements, vos remises en question… vous montrez que vous n’êtes en rien infaillible et lui offrez ainsi la possibilité d’accepter ses propres failles. Il comprend qu’il ne doit pas se décourager de ses échecs et reste digne d’être aimé.
C’est grâce à l’exemple que vous donnez qu’il se construit. Quand vous vous trompez, que vous le reconnaissez, que vous cherchez à y remédier : il gagne la liberté d’en faire autant ; lui aussi a le droit de tâtonner, de corriger le tir.
Finalement, la mère idéale est peut-être celle qui ne cherche pas à être parfaite : qui est attentionnée, aimante et généreuse, mais reste elle-même avec ses bons et ses mauvais côtés. Vous ne manquez pas de petits défauts – vous avez vos sautes d’humeur, vos moments de paresse, vos chagrins… – c’est rassurant. Vous êtes un modèle, certes, mais un modèle accessible, ce qui permet à votre enfant de prendre confiance en lui. A l’âge de la crise d’adolescent, il est important qu’il puisse se rebeller, et exprimer son agressivité. Mais vous aussi vous avez parfaitement le droit et même le devoir de vous rebeller et l’envoyer balader… Votre enfant n’est pas devant un mur, mais devant une mère qui a des émotions, des sentiments, des réactions vives parfois : c’est libératoire pour lui. Il a besoin d’un espace de différentiation.
Assumer le fait d’être une mère… qui fait ce qu’elle peut
Bien sûr, certaines choses sont meilleures pour votre enfant que d’autres. Mais si on ne fait pas toujours ce que l’on veut, l’important est peut-être de faire simplement ce que l’on peut. En apportant à votre enfant les soins essentiels dont il a besoin, en lui consacrant du temps, de l’attention, vous lui prouvez votre amour.
Votre enfant a besoin d’une maman qui se sente bien dans sa peau, qui soit heureuse, qui puisse vivre sans lui. Vouloir être parfaite engendre du stress et mène vers une déception et une insatisfaction inévitable au bout du compte.
Autorisez-vous donc à penser un peu à vous. Prenez du temps pour faire ce qui vous plait (vous êtes fatiguée : vous avez le droit de faire une sieste pour récupérer, de lire un bon bouquin sans complexe…). Vivez votre vie de femme (en confiant votre enfant de temps en temps pour pouvoir sortir), en faisant un sport ou un loisir qui vous plait… c’est un cadeau que vous faites à votre enfant.
Il ne peut qu’apprécier d’avoir une maman en pleine forme et détendue plutôt qu’épuisée et s’échinant à s’occuper de lui alors qu’elle n’en peut plus ! Votre enfant est heureux de vous sentir heureuse. Si vous aimez votre travail, tant mieux ! Mieux vaut une maman qui a une vie professionnelle épanouie et se réjouit le soir de retrouver son enfant plutôt qu’une mère qui se cantonne dans un rôle de mère parfaite qui ne lui correspond pas. En comprenant que vous avez une vie sans lui, votre enfant peut se permettre en grandissant d’en avoir une sans vous.
Accepter d’être une maman qui n’en peut plus
Il est difficile parfois, lorsqu’on vient d’avoir un bébé devant lequel tout le monde s’extasie, de ressentir de la tristesse là où l’on devrait (nous semble-t-il) ne ressentir que de la joie. Un nouveau-né vous accapare. Il requiert de nombreux soins, demande une énergie énorme… Vous avez le droit de vous sentir dépassée et vidée de toute énergie…
Si vous éprouvez des sentiments négatifs, ne culpabilisez pas. Vous n’êtes pas une mauvaise mère pour autant. Parlez-en autour de vous, faites-vous aider, «entourer» par votre entourage. Et si la tristesse persiste, consultez votre médecin qui vous aidera à passer ce cap difficile.
Il peut vous arriver de craquer ou de ressentir un sentiment de frustration. N'hésitez pas à vous faire aider et soutenir par votre entourage !
Et le papa dans tout ça ?
Vous donnez à votre enfant les soins essentiels et l’amour maternel qu’il est en droit d’attendre ; faites confiance au papa pour prendre le relais et toute sa place de père. A votre enfant cela offre un espace de liberté pour se construire sans vous. Et tous deux pourront développer une relation épanouissante.
Et les frères et sœurs ?
Le rôle de la mère parfaite se joue souvent dans le cas d’un enfant unique. En effet, à la naissance d’un deuxième enfant, une nouvelle répartition des émotions se fait. L’aîné regarde sa mère avec des yeux nouveaux : en lui amenant un petit frère ou une petite sœur, elle n’a plus rien d’une mère parfaite !
Par contre, c’est avec le petit dernier qu’une mère de famille peut tomber dans le piège de la mère parfaite, cet enfant dont elle reconnaît parfois qu’elle «veut en profiter jusqu’au bout, qu’avec lui elle se régale !». Pour ce dernier né, pas toujours facile de couper le cordon ombilical. S’il est tout pour vous, s’il lui semble que vous n’avez pas d’autre vie en dehors de lui, comment pourra t-il dépasser sa culpabilité pour oser construire la sienne ?
C’est finalement en vivant une vie en adéquation avec vos propres rêves, en étant heureuse, que vous aurez donné à votre enfant le plus chance de l’être à son tour.
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Docteur Daniel Marcelli
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