TSA (Trouble du Spectre de l’Autisme) ou autisme : repérer les signes d’alerte chez le bébé de moins de 3 ans
Mis à jour le 17 juillet 2023 Dr Marie-Agnès Jeune
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Vous, parents, êtes les personnes qui connaissez le mieux votre enfant et jouez un rôle fondamental dans son développement. Si vous vous demandez si votre enfant peut être atteint d’un Trouble du Spectre de l’Autisme (TSA), cet article va vous aider à mieux observer certains signaux chez votre enfant et à l’accompagner au mieux. Un dépistage précoce permet en effet une meilleure prise en charge pour l’épanouissement et le bien-être de l’enfant et de sa famille.
Sommaire de l'article
TSA (Trouble du Spectre de l’Autisme) ou autisme : définition, diagnostic et prise en charge précoce
Définition
Le Trouble du Spectre de l’Autisme (TSA) regroupe un ensemble de troubles neuropsychobiologiques qui affectent le bon fonctionnement du développement de l’enfant, sur plusieurs aspects (intellectuel, sensoriel, moteur ou du langage), de manière variable.
Il s’agit d’un trouble du neurodéveloppement (TND) qui associe :
- un déficit persistant de la communication et des interactions sociales dans les contextes variés (par exemple l’absence de babillage ou de contact visuel, ou encore un intérêt plus important pour les objets que pour les autres enfants ou les adultes),
- un caractère restreint et répétitif des comportements, des intérêts ou des activités. (par exemple des mouvements inhabituels et très fréquents avec son corps, ou des réactions spécifiques aux stimuli tels que la lumière, une odeur, un son, une saveur…).
L’autisme affecte environ 1 enfant sur 50.
Un diagnostic précoce difficile
Le dépistage précoce est difficile et subtil car les bébés à risque de TSA et autres TND (troubles du neurodéveloppement) présentent, surtout avant l’âge d’un an, des signes non spécifiques et communs avec d’autres pathologies (retards et déficits intellectuels, troubles sévères du langage…). De plus, l’expression tardive de certains signes rendent complexes un diagnostic précoce efficace et fiable.
Enfin, les symptômes diffèrent d’un enfant à l’autre et peuvent évoluer au fil du temps, d’où l’utilisation du mot « spectre » (au sens mathématique de « ensemble continu de signes cliniques »). Ainsi, les personnes diagnostiquées comme autistes peuvent être très différentes les unes des autres.
Pourtant, une prise en charge précoce a une influence positive sur le développement de l’enfant.
L’importance d’une prise en charge précoce
Un repérage précoce de l’autisme va permettre de mettre en place des soins qui pourront limiter un effet de « cascade développementale ». Ce repérage précoce, effectué par les parents et les professionnels, va ainsi permettre la mise en place rapide de soins.
Des psychothérapies comportementales, des adaptations éducatives et un suivi médical peuvent ainsi aider à améliorer les compétences sociales, la communication et la qualité de vie globale de l’enfant. Ces interventions seront adaptées aux besoins spécifiques de chaque enfant.
En revanche, sans mise en place de soins, les difficultés de l’enfant vont pouvoir s’installer, parfois s’aggraver et persister avec l’âge. Elles seront souvent corrélées avec la sévérité de la pathologie et l’angoisse de l’enfant.
Repérer les signes évocateurs
On retrouve souvent un ou plusieurs des signes suivants :
- Un développement atypique de la motricité globale et fine : trouble de l’initiative et/ou de l’organisation du geste, trouble de la régulation du mouvement, donc maladresse, gestes répétés inlassablement sans but précis.
- Des anomalies sensorielles avec une diminution ou une augmentation de réactivité dans chacun des sens (audition, vision, sensibilité cutanée…).
- Un trouble de l’imitation.
- Un trouble du développement du langage oral.
- Une inadaptation de relation à l’autre.
Ce sont le cumul des signes, leur durée et le retard des étapes du développement attendu habituellement qui doivent interpeler. Ces signes impliquent d’en parler avec le médecin qui suit l’enfant, qui orientera vers un service spécialisé.
Aucune particularité n’est caractéristique et ne pourrait suffire seule au diagnostic, et son absence n’exclut pas non plus le diagnostic. Ces signes peuvent aussi être très variables d’un jeune enfant à l’autre, et ils sont souvent méconnus et banalisés. Ils vont précéder le diagnostic certain de TND (Trouble du neuro-développement).
Signes d’alerte
- Tout décalage avec les acquisitions attendues pour l’âge (se référer au carnet de santé),
- Toute régression des compétences déjà acquises,
- Une trop grande hétérogénéité dans le développement,
sont des signes d’alerte et doivent vous amener à consulter un professionnel de santé.
Facteurs de risque
Il faut être particulièrement vigilants s’il existe chez le bébé des facteurs de risque comme :
- une prématurité,
- une souffrance au moment de la naissance,
- un petit poids de naissance.
Aussi s’il y a des antécédents personnels ou parentaux de pathologies chroniques sévères, de pathologies psychiatriques, de déficiences intellectuelles sévères, la prise par sa maman de toxiques ou de médicaments pendant la grossesse (alcool, dérivés du Valproate, Paracétamol…).
Enfin, si un diagnostic de trouble du spectre de l’autisme (TSA) a été posé pour un enfant de la famille, le risque de récurrence au sein d’une fratrie est estimé à 18,7 %.
Signes à surveiller
On peut retrouver certains des signes suivants :
Avant l’âge de 1 an
L’écoute et le regard sont deux outils essentiels pour comprendre le fonctionnement du corps du bébé : ses pleurs, ses regards, ses mouvements, ses réflexes, ses gestes, son tonus mais aussi sa peau et ses manifestations quotidiennes comme l’alimentation et le sommeil.
Atypies du développement :
- 2 mois : il est souvent calme, ne s’ajuste pas dans les bras, il peut être raide ou mou, « il glisse dans les bras ».
- 4 mois : il est souvent souriant et observateur, mais il gazouille peu. Il ne rit pas aux éclats ou peut rire aux éclats mais souvent seul et de façon atypique. Il ne réclame pas souvent l’adulte. Sa motricité n’est pas bien organisée.
- 5-6 mois : il ne tend pas les bras pour qu’on le prenne, il ne se retourne pas ou de façon « explosive ». Il peut présenter des postures atypiques, souvent en hyper-extension. Il gazouille peu.
- 9 mois : il a peu d’initiatives motrices, il se déplace souvent de façon atypique : sur les fesses en rameur, roule pour se déplacer, a un rampé asymétrique. Il a des postures étranges. Il a souvent une hyperlaxité (grande amplitude articulaire). Il joue longuement avec ses mains avec des objets. Il ne jette pas, ne change pas de main. Il n’a pas de bisyllabes (ba-ba, da-da, ta-ta). Son babil est peu mélodieux. Il n’a pas de gestes sociaux ou alors juste un « bravo » très sensoriel. Il ne répond pas à son prénom.
- 1 an : il ne prononce pas de mot signifiant quelque chose. Il réclame peu l’adulte, il joue seul en manipulant ou au contraire pleure beaucoup et ne se pose jamais. Le mode de déplacement peut être atypique, asymétrique et peu fluide. Il a pu marcher très tôt ou au contraire marcher tard. Les parents disent souvent : « dès qu’il a marché il est parti », « il file ». Sa préhension reste peu fluide. Il ne tend pas la main pour demander. Il n’a pas de gestes sociaux.
Avant l’âge de 18 mois
- Niveau de vigilance : le bébé est trop calme et réclame peu l’adulte. Il peut aussi être très irritable et ne se calme pas facilement dans les bras.
- Sommeil souvent atypique : le bébé dort beaucoup, n’appelle pas au réveil. Il peut au contraire présenter des troubles du sommeil (ne dormir qu’avec l’adulte, se réveiller souvent…).
- Alimentation : souvent il n’a pas su téter au sein, il réclame peu ou mange tout le temps. Il est souvent très sélectif et refuse les textures nouvelles et les goûts nouveaux et il est très ritualisé. Il a du mal à manger des morceaux.
- Régulation des émotions : il peut faire des crises de colère inexpliquées. Il « n’aime pas » être pris dans les bras. Il peut être indifférent.
- Répertoire moteur atypique avec peu d’initiatives motrices : l’enfant explore peu l’environnement qui l’entoure à l’aide de ses sens.
Après l’âge de 18 mois
Les signes d’alerte de TSA sont plus facilement identifiables. Aucun de ces signes, pris de façon isolée, ne peut signifier que l’enfant est autiste, mais l’association d’au moins deux d’entre eux doit alerter.
- Atypies relationnelles : il a peu d’initiatives relationnelles. Il peut jouer longtemps seul, il est très indépendant. Il peut aussi être tout le temps collé à l’adulte. Le maintien de l’attention conjointe (l’enfant montre avec la main ou le bras tendu (pointage) ce qu’il veut ou ce qui l’étonne : il cherche à attirer l’attention de l’adulte. Inversement, il regarde ce que l’adulte lui montre du doigt) est difficile, il a peu de regard adressé, de sourire partagé, il n’a pas de pointage à distance coordonné avec le regard.
- Atypie de la réactivité sociale : il a peu de réponse au prénom. Il est décrit comme « dans son monde », « dans sa bulle ». Il n’imite pas ses parents dans la vie quotidienne.
- Atypies du langage et de la communication : il comprend peu les consignes orales, son langage expressif est atypique, souvent limité à des sons ou des syllabes répétées. Il utilise parfois un jargon. Il peut aussi répéter toujours les mêmes mots ou expressions. Il peut au contraire être en avance et avoir parfois un discours inadapté.
- Atypies du jeu et du comportement. Son jeu est souvent pauvre et répétitif, il aime faire tourner, il regarde souvent de près les objets qu’il fait tourner et peut rester longtemps devant la machine à laver ou allumer et éteindre une lampe. Il aime manipuler, construire, jouer avec l’eau. Il est fasciné par les lumières, les écrans et peut devenir « addict ». Il aime souvent mettre des objets dans des trous, se cacher sous les meubles. Il a souvent une intolérance à la frustration, il veut faire comme il veut. Pour éviter qu’on le prenne, il peut se laisser glisser comme du « chewing-gum »
- Atypie des réponses sensorielles : il peut être hypo (absence ou quasi-absence de réaction) ou hyper-réactif (réaction disproportionnée). Il a une exploration inhabituelle des « objets » de l’environnement (recherche ou évitement de certaines sensations, par exemple taper régulièrement sur ses oreilles pour obtenir des sensations auditives ou appuyer sur ses yeux pour obtenir des sensations visuelles, ou à l’inverse paniquer dans certaines ambiances sonores ou visuelles).
- Atypies des capacités d’imitation : Des capacités d’imitation inférieures à celles des enfants du même âge : pas d’imitation de geste (bravo, au revoir puis plus tard se coiffer ou coiffer quelqu’un, puis plus tard pas de jeu de faire semblant comme la dînette, pas d’imitation d’émotions comme faire semblent d’être triste.
- Des déficits d’imitation sont plus marqués pour les actions nouvelles alors que les actions courantes répétées peuvent être acquises. L’enfant pourra par exemple faire semblant de manger avec de vrais objets mais ne le fera pas avec un objet imaginé comme une feuille à la place de l’assiette et un bâton à la place de la fourchette : c’est le jeu symbolique qui est très difficile.
Aides au diagnostic
Même si la crèche, le médecin, vos familles, vos amis vous ont rassuré(e)s : « ce n’est pas grave », « chacun son rythme », « on est tous différents » , si vous avez le moindre doute, n’hésitez pas à insister auprès du médecin votre enfant ou même à prendre un autre avis.
De plus, des outils précieux existent, que vous pouvez utiliser en lien avec les professionnels qui suivent votre enfant.
Carnet de santé et livret de repérage
Le carnet de santé avec particulièrement les visites de 2 mois, 4 mois, 9 mois et 2 ans, et depuis peu un livret de repérage avec, chez le nourrisson, des fiches à 6 mois, 1 an, 18 mois et 2 ans, permettent de suivre l’évolution de votre enfant.
Pour télécharger le livret de repérage pour utiliser les grilles d’observation par âge, cliquez-ici ou sur l’image.
En complément des grilles de repérage, on peut utiliser une grille de repérage spécifique aux TSA pour les enfants de 16 à 36 mois : « la M-CHAT-R » que l’on peut télécharger ici.
En cas de doute, n’hésitez pas à en parler au médecin qui suit votre enfant et pourra vous conseiller et vous orienter si besoin.
L’importance des consultations pour une prise en charge précoce
Si vous observez ces comportements précurseurs chez votre enfant, il est recommandé d’alerter les professionnels de santé qui vont pouvoir vous orienter pour mettre en place des soins de rééducation et organiser une démarche qui aboutira au diagnostic.
7 ans est en effet le délai moyen, en France, pour obtenir chez l’enfant un diagnostic de troubles du développement comme l’autisme, or c’est beaucoup trop tard. Ce diagnostic doit être évoqué au mieux vers 18 mois ou deux ans pour les formes graves, et 3-4 ans pour les formes moins typiques.
Les consultations régulières de suivi chez le médecin que vous avez choisi pour votre enfant, et au moindre doute, une consultation pédiatrique sollicitée par ce médecin s’il n’est pas pédiatre, pourra vous permettre de faire le point et de déclencher examens complémentaires et prise en charge si nécessaire. Une plateforme de coordination et d’orientation existe et peut être sollicitée par le médecin pour faciliter les prises en charges.
Les pédiatres, les psychologues spécialisés dans le développement de l’enfant et les neurologues sont des experts qualifiés pour évaluer les symptômes de l’autisme. Le diagnostic est basé sur une évaluation complète de l’enfant, comprenant des observations cliniques, des tests de développement et des entretiens avec vous, parents.
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